Quand vous festoyez chez un ami qui a commandé des plateaux de fruits de mer hors de prix, simplement pour vous rendre une invitation sans prétention quelque temps auparavant, vous le gratifiez de toutes sortes de louanges et pourquoi pas d’un ouah, tu mériterais une rue à ton nom ! L’ami en question était Jacques Bonnaval, un collègue de travail de Scanreigh, devenu directeur de l’école des Beaux-arts de Saint-Etienne et instigateur en 1998 d’une biennale de design dont il avait compris que la ville en avait exactement le profil.
Nous avons passé cinq ans de notre vie à Saint-Etienne, notre fils y est né. Nous y sommes retournés pour découvrir le musée d’art contemporain inauguré après notre départ de la ville, puis pour deux biennales de design et en 2015 pour une exposition Scanreigh à la galerie Le Réalgar. Dix ans plus tard, nous y re-voilà pour la signature d’un livre avec Lionel Bourg dans la librairie Quartier Latin tenue par Daniel Damart, créateur des éditions Le Réalgar et ex-galeriste de la galerie susmentionnée.
C’est l’occasion de voir tout ce qui a changé dans la ville et notamment la Cité du design que nous n’avions jamais vue. Inaugurée en 2009 sur le site de l’ancienne Manufacture nationale d’armes, elle abrite désormais l’école des Beaux-Arts dédiée au design. En déambulant sur le site somptueux de l’ancienne Manu, nous découvrons que notre ami Bonnaval a une rue à son nom ! Plus exactement une esplanade entière… et les plateaux de fruits mer hors de prix n’y sont pour rien !
Personnalité flamboyante, fumeur invétéré (et pas que) sachant remuer ciel et terre pour ce qu’il croyait en valoir la peine, Jacques Bonnaval est arrivé à l’école des Beaux-Arts suite à une gué-guerre administrative à propos d’un concours pipé pour recaser une fonctionnaire au détriment de candidats compétents (Christian Bernard !). Le branle-bas de combat de certains profs, dont Scanreigh, contre le directeur de l’école a eu pour conséquence l’invalidation du concours et le recrutement à la loyale de Jacques Bonnaval. Suite à cette arrivée tonitruante, Scanreigh et Bonnaval ont sympathisé.
A l’époque Bonnaval organisait avec sa femme des expositions dans leur appartement de Limoges sous le nom de galerie Jamart-Bonnaval. Daniel Buren y avait fait une intervention aussi discrète que transgressive en marquant de ses célèbres bandes les plinthes du lieu. Scanreigh y a exposé plus classiquement une série de linogravures en 1984.
Par la suite, Jacques Bonnaval nous a introduit auprès de l'éditeur Jean-Michel Place. Un projet de livre avec un texte et un titre très "bonnavalesque", Bordel 7 étoiles s'est concrétisé en 1987 chez Place. J'en ai fait la maquette et j'avais demandé à Scanreigh de créer des lettrines et des culs de lampes spécialement pour elle.
Plus récemment, en 2018, Scanreigh a dédié une palette à la mémoire de Jacques Bonnaval intitulée Champagne comme pour trinquer une fois de plus avec lui. La palette est réalisée avec le bois d'un coffret de bouteille de champagne.