Un petit signe depuis New York de la part d’André Spears par lequel il nous informe de la parution de son dernier livre, son schizo-poëme, travail de longue haleine comme il dit… au contenu pointu comme à son habitude.
La 4e de couverture précise que rien dans la poésie américaine ne se rapproche autant de l'approche formelle mise en œuvre par Jacques Derrida dans son livre Glas (1974) que ce nouveau livre de Spears. Même structure bipartite : un poème épique d'une part confronté à une série de citations d'autre part. "Il existe très peu d'œuvres dans la poésie américaine qui se rapprochent de l'énergie intertextuelle et de l'étendue des connaissances dont fait preuve Spears. Hors des radars du marché de la poésie de son propre fait, il est l'un des poètes les plus singuliers travaillant en langue anglaise".
Petite remarque en passant : ce n'est pas exactement ce que laisse présager l’esthétique de la couverture à mille lieues du code graphique poético-littéraire pratiqué par l’édition française de ce côté-ci de l'Atlantique et pour qui les écrits de Spears ne se concevraient que sous couverture blanche, papier sec, à grain de préférence, typo BCBG et corps de caractère réduit ! Ce hiatus est précisément ce qui intéresse Spears qui joue le décloisonnement et l’interférence des registres dans tous les domaines. Alors va pour la poésie d’avant-garde sous des allures de science-fiction ! Tout est à cette image pour ce New-Yorkais de Greenwich Village qui après 25 ans de carrière à un haut niveau dans le transport maritime gréco-américain, se consacre à la littérature. Titulaire d'un doctorat en littérature comparée, il a publié des articles dans des revues universitaires américaines et canadiennes avant de s’adonner à la poésie et à la littérature "expérimentale" pour dire vite, attentive aux mutations et interconnexions culturelles les plus actuelles.
En 2010, dans feu notre ancien blog, nous avions commenté un texte qu'André Spears avait consacré à l'exposition-hommage à Miles Davis, We want Miles, à la Cité de la Musique de Paris. Il y notait que le décloisonnement du jazz vers les formes créatives de la scène pop-rock-rap est un phénomène qui s’observe aussi en poésie et dont les formes du renouveau sont profondément inscrites dans la révolution numérique.
C’est d’ailleurs par la voie de ses ramifications transfrontalières que Scanreigh et André Spears se sont rencontrés à New York en novembre 2000. Scanreigh présentait à la Columbia University ses « placards » réalisés avec les écrivains et les poètes. Par un enchainement quasi naturel est née l’idée d’une collaboration. Cela a commencé par deux livres d’artiste puis s’est poursuivi par un projet de 50 estampes basées sur les expressions françaises passées dans l’anglo-américain. Chacun des placards commence par « Like » suivi d’une combinaison logico-poétique, une sorte de greffe linguistique elle-même fixée dans l’image. Quelques exemples de cette collaboration on été présentés en 2010 au Cabinet d'Amateur à Paris, puis un ensemble plus important à la Bibliothèque du Carré d'Art à Nîmes en 2011.
En France, André Spears ainsi que Scanreigh figurent au catalogue exceptionnel de l’éditeur-plasticien Richard Meier / Voix Editions qui a publié plusieurs livres de Spears illustrés par l'artiste suisse Gilgian Gelzer. F.B.