Propos d'artiste

Catalogue Scanreigh, Théâtre de Sain-Quentin-en-Yvelines, mars 1998. [...] Enfant, je tirais une sorte de fierté exotique d'être né au Maroc, tout comme l'Alsace m'est apparue exotique car je ne m'y suis adapté que lentement. Être passé par là plutôt que d'y avoir des racines. J'ai pris l'habitude de voir les choses de l'extérieur avec un léger décalage et je ne suis pas frustré de ce que les choses soient impénétrables. Le fait que la réalité se donne comme une énigme est au contraire une stimulation. Le sentiment d'incertitude qui en découle est pour moi un sentiment étrange, annonciateur de découvertes et mes tableaux en retiennent — malgré la confiance — aussi la crainte d'une menace et d'une déstabilisation. [...]»

[...] L'assemblage, le puzzle, le palimpseste sont des procédés privilégiés pour moi : il me faut toujours un préalable pour travailler. Longtemps ce fut des fonds froissés, aujourd'hui ce sont surtout des collages de mes propres estampes et pages de livres d'artiste. Je me réinvente une paroi rupestre avec des accidents de surfaces qui sont autant de défis à relever ou à exploiter. Une esthétique primitiviste peut-être, mais l'art non occidental n'est plus à découvrir ni à défendre ; je jouis d'une liberté acquise par ceux qui l'ont fait avant moi sans me sentir obligé de décliner une dette. Mes citations, essentiellement des autocitations, sont davantage une illustration de la circularité omniprésente dans la création. Les Italiens de la transavantgarde l'ont fait à leur manière avec ironie, je le fais autrement, plus proche de l'obsessionalité de l'art brut mais conscient de ce que la culture se mord parfois dangereusement la queue... ce que les exclus de la culture ignorent. J'imagine parfois un Docteur-Frankenstein-de-l'art bricolant de toutes pièces un hybride pour briser le cercle vicieux. [...]

Scanreigh, Dessins in carnets,  Éditions Cardinaux, Châtellerault, 2002.
[…] Ce que je qualifie de « carnets « sont en fait d’étranges reliques, ce sont des recueils de poésie, des livres de dédicaces, des carnets de comptes, des partitions de musique, des cahiers d’école, presque toujours inachevés, un mélange de pages couvertes d’écritures anciennes et de pages vierges. L’inachèvement les a sans doute sauvés de la destruction. Ils sont souvent solidement reliés et leurs calligraphies anciennes sont émouvantes. Cela ne m’empêche pas d’être sans pitié pour elles, de tout recouvrir d’un impérialisme scriptural sans aucun scrupule ou presque. Pour cela j’utilise tout ce qui trace, tache, coule, encres de chine et de couleur, aquarelle, stylos, plumes, pinceaux, crayons et calames, en passant par tous les gris, noirs, sépias, par tous les camaïeux et tous les contrastes sur tous les styles de papier, du plus désinvolte, grunge, au plus chic, neuf ou abîmé, du sublime papier XVIIIe au tout rouillé du XIXe et l’infini gamme des ordinaires du XXe.
[…] Ce que je considère comme mes véritables premiers carnets de dessins sont contemporains d’une époque où je fais table rase d’une certaine orthopédie du trait ; fini les tampons, les exercices géométriques !  C’est le début des années 80, j’ai envie de « dessiner «, de figurer des choses, des êtres et mes carnets traduisent l’angoisse de la transition.  Tout se cherche, les outils, le trait et moi aussi.
[…]  Les carnets font ainsi l’historique de ce que je capte dans le regard de l’autre, de ce que j’en abandonne (presque tout), de ce que j’y greffe. Cette accumulation de stades et de phases me fournit des modèles inédits qui attendent à leur tour leur réemploi. Des dessins de mes carnets je fais des versions agrandies, sur des feuilles libres, parfois immenses quand je passe à l’échelle du tableau. Je les peins et tout se transforme à nouveau… avec toujours cette crainte de perdre la vérité et l’angoisse originelle sans parler du sentiment dérangeant d’être en train de faire un produit à exposer ou à vendre.    […]

Quoi d'autre ?

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Making of

Voir la genèse de certains motifs dans l'œuvre de Scanreigh. Récurrences,  évolutions,  permanences…

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Côté décoration

Ressources pour le décorateur. La piste des arts appliqués, paravents, textiles…

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Le collectionneur, metteur en scène

"Home, sweet home" quand les œuvres trouvent leur place…

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Les coulisses

Découvrir les différents ateliers que Scanreigh a occupé depuis ses débuts. L'accrochage d'une exposition à travers quelques exemples.  

Extraits critiques

Scanreigh, Un récit en dents de scie Catalogue d’exposition, Galerie Laurent & Laurent, Nice, 2022
[…]  De ses débuts, lorsque dans les années 70 l’artiste travaillait l’abstraction à partir du pli et du contre-pli pour figurer les effets de surface, subsiste cette volonté de s’émanciper de toute figuration. Celle-ci n’intervient qu’en toile de fond, telle une ponctuation encadrant une organisation de séquences qu’il nous  incomberait de nourrir au gré des caprices de notre imaginaire. Car c’est là toute la difficulté de «lire» Scanreigh alors qu’il ne cesse d’interroger la forme, de la triturer jusqu’à ce que celle-ci, à bout de souffle, renonce à sa souveraineté pour faire jaillir rictus et orbites au milieu des étoiles. […]
[…] C’est alors le règne d’une peinture désarticulée mais savamment  réfléchie. Un formalisme lointain répond ici à la tentation de l’art brut. Et tout cet excès, cette tension retenue, énoncent une trame dont l’ensemble des fils narratifs serait devenu tellement inextricable que seuls d’insolites rappels du quotidien s’échouent encore pour en extraire la vacuité. Voici donc le puzzle d’un récit en dents de scie. Chaque fragment exhume la cicatrice d’une image - dessins d’enfants, membres incertains ou griffes accrochées aux grilles d’un temps lointain. La peinture revient alors comme un pan de ciel jaune sur la toile. Elle dépose ses trouées et ses taches. Elle demeure cette page vide que l’artiste cisaille, dé-couture dans une rythmique froide pour piéger les zones de lumière, en extraire les aspérités, en caresser les rugosités et s’abandonner enfin à la couleur. C’est alors la danse endiablée du feu et de la glace, les entrailles qui giclent et la grimace du rire. Les visages sont des masques mais la peinture est là pour les démasquer et peut-être leur restituer l'aura d'une humanité primitive.[…]
[…] L’artiste est toujours celui qui met au monde des images, qui veille à leurs premiers balbutiements et à l'invisible du souffle qui leur donne vie. Scanreigh est l’artiste qui cisaille le cordon ombilical de l’imaginaire pour laisser peintures et figures s’engouffrer dans la réalité d'une oeuvre et s’épanouir librement.  […]

Françoise Biver Sylvain Cavaillès, Frontière Noire, Mémoire active, Lyon 2017
Dans son devenir figuratif au début des années 80, la peinture de Scanreigh relevait paradoxalement encore du regard matérialiste prôné par l’avant-garde française qui l’avait inspirée. Attaché au « faire » et au « comment faire », le Scanreigh abstrait, adepte du pistolet pulvérisateur de couleur s’est intéressé aux burins qui griffent, aux gouges qui creusent et aux craies qui effleurent des pierres, c’est-à-dire aux techniques d’impression de l’édition d’art. Celles-ci lui ont fourni un échantillonnage de traces et de traits qui ont dicté leur style à sa recherche graphique. Quant à la question « quoi représenter », la réponse a d’abord été : « le moins possible » comme par fidélité au surmoi minimaliste des débuts, mais que l’artiste a gentiment éconduit durant quelques années en assemblant des ferrailles de récupération et des tiges de verre abandonnées par une industrie passementière déchue. Les pièces qui en résultaient, hirsutes, ajourées, étaient comme « du dessin dans le vide ». Ce degré zéro de la représentation pouvait dès lors s’immiscer dans les tableaux abstraits. Ou comment des sujets insignifiants en sculpture et les leçons technico-stylsitiques de l’édition peuvent opérer une mutation figurative en peinture.L’artiste ne cessera d’accentuer les lignes et les formes naissantes vers des physionomies humaines ou animales, vers des motifs foisonnants toujours à la limite du reconnaissable. Cette figuration qu’on associerait volontiers à du néo-expressionisme n’en a ni la gestuelle ni le côté viscéral. Le chaos scanreighien est très prémédité, il tient en laisse, il contient les tensions et laisse voir les lenteurs du « comment faire ». L’énergie est bien là, mais elle porte les stigmates de ce qui se libère d’une gangue et se fraie un chemin. Avec le temps le dessinateur s’est certes affranchi du travail du graveur, mais il en a gardé l’héritage ; c’est en cela que sa manière de styliser le visible doit si peu aux codes de la caricature ou de la bande dessinée dont se réclament les confrères de la « Figuration libre » et bien que Scanreigh partage avec eux le même intérêt ainsi que le goût des images médiatisées.  […]

Christophe Comentale,Conservateur en chef honoraire  du Musée de l’Homme Art & Métiers du Livre N°314, 2016

[…] Le plaisir des tondi : Jean-Marc Scanreigh aime composer avec les figures : outre le carré et le rectangle, sa faveur va aussi au tondo, correspondant à un type d’oeuvres exécuté depuis l’Antiquité mais dont l’âge d’or est la Renaissance. La perfection de la forme convient aux sujets religieux, tels que ceux de la Vierge et de l’Enfant Jésus. Pour l’artiste, le papier comme le bois et la toile sont, à l’égal des matériaux de récupération, des supports idéaux à investir. Il réalise des tondi au lavis, en gravure, puis une importante série à la peinture à l’huile voit le jour en 2007-2009, les diamètres allant de 40 cm à un mètre.  […]
[…] Entre placards et matrices : Au terme d’une production conséquente, fruit de nombreuses collaborations, presque 100 placards, ou estampes associées à un texte, sont nés en treize ans. Sur le plan pratique, leur fabrication a nécessité la mise en oeuvre de différentes techniques de composition et d’impression : typographie et phototypie, lithographie, taille-douce, gravure sur bois ou linoléum, sérigraphie. Certaines estampes comportent des montages, des collages et parfois des rehauts d’aquarelle et d’encre. Les supports sont précieux ou modestes, selon les cas. Omniprésentes, gravées, peintes, rehaussées, les matrices sont éparses dans toutes les époques de création de l’artiste. Une remarquable suite, celle des Stations du noir, a donné lieu à une exposition dans la chapelle du Carmel à Chalon-sur-Saône en 2013 […]
[…] Les matrices peuvent aussi être considérées d’une autre façon. En 1995, Jean-Marc Scanreigh sauve de la benne à ordures des parallélépipèdes de bois, qu’on appelle des fantômes : le bibliothécaire les dispose sur le rayonnage à la place du document pendant la durée du prêt. Il en fera un livre l’artiste, évidemment titré Fantôme ! Dans cette même veine de récupération, une vingtaine de planches en contreplaqué de 30 x 40 cm utilisées pour les prises de notes des étudiants, toutes couvertes de graffiti, sont récupérées par l’artiste. Il y ajoute à la gouache des notations colorées. Ainsi naît en 2010 la suite « Squiggle », d’après le nom du jeu adopté par le psycha nalyste anglais Donald Winnicott pendant ses thérapies. […]

Armand Dupuy, Pieds bleus, grandes bâches. Catalogue Chapelle des Jésuites de Nîmes,  2011  

[…] Il pousse l’image si loin d’elle-même qu'elle s'avale dans un grand hoquet et, ce qui était radicalement extérieur – un corps étranger tiré d’une pub, d’une photo de mode ou d’un tableau de maître – par je ne sais quel tour, pivote en figure intime. Par mimétisme, on pourrait s'emparer d'un détail insignifiant et l’utiliser comme levier pour détacher de la masse ce qu’on cherche. On pourrait l’encercler par un flot de parole continu, le lessiver, le répéter jusqu'à l'acharnement, jusqu'à le noyer dans le discours et le faire reparaître, à force de concrétion puis d’érosion, chargé d'une histoire qui le dépasse. Mais il faudra se faire une raison... La méthode n’est pas recette. […]
[…]  Un jour, il se pourrait, si cela n'est pas déjà fait, qu'à force de contorsions le peintre s'oublie dans un tableau. Après tout, ces grandes bâches déroulées devant nous sont des espaces habitables : « la peinture est la maison des yeux » notait Bernard Noël. Mais celle de Scanreigh est sans nulle doute plus vaste et vorace demeure. En y passant les yeux, deux yeux bleus comme deux pieds, on s'aperçoit soi-même foulant les couleurs qui font le bord d’un abîme. Il faut peu de temps d'ailleurs, alors qu'on déambule dans l'inquiétude de déséquilibres successifs, pour que la maison nous habite à son tour. Ces vastes peintures sont à la fois le dedans et le dehors. […]

Christophe Comentale,Conservateur en chef honoraire  du Musée de l’Homme Art & Métiers du Livre N°314, 2016

[…] Le plaisir des tondi : Jean-Marc Scanreigh aime composer avec les figures : outre le carré et le rectangle, sa faveur va aussi au tondo, correspondant à un type d’oeuvres exécuté depuis l’Antiquité mais dont l’âge d’or est la Renaissance. La perfection de la forme convient aux sujets religieux, tels que ceux de la Vierge et de l’Enfant Jésus. Pour l’artiste, le papier comme le bois et la toile sont, à l’égal des matériaux de récupération, des supports idéaux à investir. Il réalise des tondi au lavis, en gravure, puis une importante série à la peinture à l’huile voit le jour en 2007-2009, les diamètres allant de 40 cm à un mètre.  […]
[…] Entre placards et matrices : Au terme d’une production conséquente, fruit de nombreuses collaborations, presque 100 placards, ou estampes associées à un texte, sont nés en treize ans. Sur le plan pratique, leur fabrication a nécessité la mise en oeuvre de différentes techniques de composition et d’impression : typographie et phototypie, lithographie, taille-douce, gravure sur bois ou linoléum, sérigraphie. Certaines estampes comportent des montages, des collages et parfois des rehauts d’aquarelle et d’encre. Les supports sont précieux ou modestes, selon les cas. Omniprésentes, gravées, peintes, rehaussées, les matrices sont éparses dans toutes les époques de création de l’artiste. Une remarquable suite, celle des Stations du noir, a donné lieu à une exposition dans la chapelle du Carmel à Chalon-sur-Saône en 2013 […]
[…] Les matrices peuvent aussi être considérées d’une autre façon. En 1995, Jean-Marc Scanreigh sauve de la benne à ordures des parallélépipèdes de bois, qu’on appelle des fantômes : le bibliothécaire les dispose sur le rayonnage à la place du document pendant la durée du prêt. Il en fera un livre l’artiste, évidemment titré Fantôme ! Dans cette même veine de récupération, une vingtaine de planches en contreplaqué de 30 x 40 cm utilisées pour les prises de notes des étudiants, toutes couvertes de graffiti, sont récupérées par l’artiste. Il y ajoute à la gouache des notations colorées. Ainsi naît en 2010 la suite « Squiggle », d’après le nom du jeu adopté par le psycha nalyste anglais Donald Winnicott pendant ses thérapies. […]

Armand Dupuy, Pieds bleus, grandes bâches. Catalogue Chapelle des Jésuites de Nîmes,  2011  

[…] Il pousse l’image si loin d’elle-même qu'elle s'avale dans un grand hoquet et, ce qui était radicalement extérieur – un corps étranger tiré d’une pub, d’une photo de mode ou d’un tableau de maître – par je ne sais quel tour, pivote en figure intime. Par mimétisme, on pourrait s'emparer d'un détail insignifiant et l’utiliser comme levier pour détacher de la masse ce qu’on cherche. On pourrait l’encercler par un flot de parole continu, le lessiver, le répéter jusqu'à l'acharnement, jusqu'à le noyer dans le discours et le faire reparaître, à force de concrétion puis d’érosion, chargé d'une histoire qui le dépasse. Mais il faudra se faire une raison... La méthode n’est pas recette. […]
[…]  Un jour, il se pourrait, si cela n'est pas déjà fait, qu'à force de contorsions le peintre s'oublie dans un tableau. Après tout, ces grandes bâches déroulées devant nous sont des espaces habitables : « la peinture est la maison des yeux » notait Bernard Noël. Mais celle de Scanreigh est sans nulle doute plus vaste et vorace demeure. En y passant les yeux, deux yeux bleus comme deux pieds, on s'aperçoit soi-même foulant les couleurs qui font le bord d’un abîme. Il faut peu de temps d'ailleurs, alors qu'on déambule dans l'inquiétude de déséquilibres successifs, pour que la maison nous habite à son tour. Ces vastes peintures sont à la fois le dedans et le dehors. […]

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